Qu’en dit la science ? (en)

Par Heiani Touaitahuata, Docteur en biologie

Cycling for Earth : Un mouvement ancré dans les faits 

Le changement climatique actuel

Le climat est l’ensemble des conditions atmosphériques moyennes (températures, précipitations, ensoleillement, humidité de l’air, vitesse des vents, etc.) sur des temps longs et des zones vastes.

Au cours de l’Histoire de la Terre, le climat a régulièrement varié, alternant entre des périodes glaciaires et interglaciaires tous les 80 000 ans environ (Fig 1.).

Fig 1. Evolution de la différence de température par rapport à la moyenne au cours des 800 000 dernières années (source : données du forage Epica, Dôme C)).

En effectuant l’analyse des gaz piégés dans la glace, les scientifiques ont établi une corrélation entre la variation de la température atmosphérique et la concentration des gaz à effet de serre (GES) présents dans l’atmosphère. Parmi eux, les célèbres dioxyde de carbone (CO2) et méthane (CH4). Ainsi, lorsque la teneur de ces GES augmente, la température de l’atmosphère augmente également (Fig 2.).

Fig 2. Evolution de la teneur en CH4, de CO2 et de la température au cours des 400 000 dernières années (source : ENS Lyon).

Le climat a donc toujours “fluctué” et nous sommes actuellement dans une période interglaciaire, alors pourquoi tant d’inquiétudes ?

Perturbation brutale du climat

De nos jours, le problème est davantage associé à la rapidité de ce réchauffement climatique. Depuis le début de l’ère industrielle, la concentration en GES ainsi que la température de l’atmosphère ont rapidement augmenté. Un lien entre activités humaines et climat est alors mis en avant (Fig 3a. et 3b.)

Fig 3a. Evolution de la teneur en CH4, de CO2 au cours des 1 000 dernières années (source : Bordas).

Fig 3b. Evolution de la différence de température par rapport à la moyenne depuis le début de l’ère industrielle (source : ecologique-solidaire.gouv.fr).

Ainsi, plus la concentration atmosphérique en GES est élevée, plus la température l’est également. Cette corrélation s’explique par l’Effet de serre : une part de l’énergie solaire reçue à la surface de la Terre est réémise vers l’espace sous la forme de rayonnement infrarouge dont une partie est piégée par les GES.

En interceptant ces rayons, les GES retiennent de la chaleur dans l’atmosphère permettant d’avoir une température de surface moyenne de 15°C environ au lieu de près de -18°C (Fig 4.)

 

Fig 4. Processus de l’effet de serre (source : Météo France).

 

Initialement naturel, ce processus a été essentiel à l’apparition et au développement de la vie sur Terre. Cependant, les activités humaines à l’origine d’une importante libération de GES participent drastiquement à ce réchauffement du climat.

 

Perturbation brutale du climat et quelques origines anthropiques

Utilisation des ressources fossiles

L’une des origines anthropiques du changement climatique actuel est l’utilisation irraisonnée de trois ressources fossiles terrestres : le pétrole, le charbon et le gaz naturel.

Composés de carbone et utilisés dans de nombreux domaines (transport, industrie, etc.), leur combustion excessive participe à l’augmentation de CO2 dans l’atmosphère.

–> Cette hausse entraîne alors celle de l’effet de serre qui se répercute sur l’élévation de la température atmosphérique et consécutivement sur le climat (Fig 5.).

Fig 5. Evolution des flux de CO2 liés aux activités humaines depuis le début de l’ère industrielle (source : Bordas)

Un cercle vicieux, vous l’avez bien compris, qui est malheureusement alimenté par plusieurs sources…

Diminution et perturbations des puits de carbone.

Ne se limitant pas à la surconsommation des ressources fossiles, les activités humaines perturbent également les puits de carbone de la Terre. Naturellement, les végétaux chlorophylliens ainsi que les océans, participent à la diminution de la concentration atmosphérique en CO2. Les premiers par photosynthèse, les seconds par dissolution dans l’eau. 

Eléments importants du cycle du carbone, les végétaux chlorophylliens absorbent le C02 et utilisent l’énergie lumineuse pour produire leurs matières organiques. De plus, au cours de ce processus de photosynthèse, ces végétaux libèrent du dioxygène (Fig 6.) : déchet pour eux, composant crucial pour de nombreux autres êtres vivants, dont l’Homme…

Fig 6. Processus de la photosynthèse (source : Sciences et Avenir).

Dans les océans, le CO2 peut être dissout dans l’eau ou précipité sous forme de carbonate (coquille calcaire par exemple) (Fig 5). Une augmentation du CO2 atmosphérique conduit alors à une élévation de la concentration de CO2 dans l’eau qui entraîne, in fine, une modification de son pH : la fameuse acidification des océans… Par ailleurs, les océans ont également la capacité de compenser les variations de la température atmosphérique (source : Sciences 2018) : le fameux réchauffement des océans

Ainsi, à force de privilégier les activités augmentant les sources de CO2 et diminuant les capacités des puits de carbone, la quantité de GES présente dans l’atmosphère s’accroît.

 

Et s’il n’y avait « que » cela…

 

Activités humaines irraisonnées : quelques origines

Selon un rapport des Nations Unies, en 2100 la Terre abritera près de 11,2 milliards d’êtres humains.

 

Nourrir l’humanité

Pour satisfaire ses besoins alimentaires, l’Homme a développé des systèmes agricoles intensifs. Maître mot : augmentation du rendement ! Cependant, ces procédures sont :

– déséquilibrées : une partie de la matière organique est prélevée puis exportée hors du système obligeant alors l’apport de matières (engrais, eau, etc.) et d’énergie (labourer, éclairer, etc.),

– consommatrices de pesticides pour les cultures ou encore des antibiotiques pour les élevages afin de limiter les pertes de production dues aux maladies, espèces ravageuses ou espèces concurrentes,

– de grandes consommatrices d’eau : plus de 70 % de l’eau potable de la Terre est utilisée pour l’agriculture (source : ConsoGlobe),

– fortement émettrices de GES (activité agricole elle-même, exportations, etc.),

– responsables d’une déforestation massive. 

 

Améliorer le confort

Dans notre société moderne, le confort peut être synonyme de dépendance et de surconsommation.

Dépendance et surconsommation de produits alimentaires transformés et potentiellement dangereux pour la santé (M.Mondialisation 2018). 

Dépendance et surconsommation des énergies fossiles pour se déplacer, toujours plus, toujours plus loin ou encore pour le quotidien : se nourrir, s’abriter, se chauffer, se vêtir, se divertir, etc.

 Dépendance et surconsommation de produits à usage unique comme les pailles ou les bouteilles en plastique. Ah le plastique, parlons-en du plastique ! Matériaux issus de la transformation du pétrole, sa consommation et donc sa production augmente dramatiquement depuis les années 1950  (Fig 7).

 

 

 

Fig 7. Production primaire de plastique entre 1950 et 2015 (source : Libération à partir R. Geyer & al.)

 

 

Activités humaines irraisonnées : quelques conséquences interconnectées

 

 

La fonte des glaces

 

Le réchauffement climatique entraîne notamment des conséquences irrémédiables sur les glaces des pôles. En Arctique, leur surface moyenne a nettement diminué au cours de ces dernières décennies (Fig 8).

 

Fig 8. Effet du réchauffement climatique sur les glaces arctiques (source : Bordas).

Les glaces antarctiques réagissent différemment en présentant une diminution de leur masse globale et des détachements d’énormes icebergs (Fig 9.).

 

Fig 9. Effet du réchauffement climatique sur les glaces antarctiques (source : Bordas).

Ces effets sont notamment responsables :

– de la perturbation des écosystèmes locaux par perte de surface,

– de la hausse du niveau des mers qui conduit, entre autres, à la perturbation des courants marins et consécutivement à celle de la biodiversité associée par modification des axes migratoires par exemple,

– de la baisse des surfaces côtières et donc de l’augmentation du nombre de réfugiés climatiques (M.Mondialisation 2016).

Par ailleurs, les scientifiques ont démontré que le changement climatique actuel conduisait à la fonte des permafrosts, sols gelés en permanence pendant au moins deux ans, entraînant la libération des micro-organismes et GES qui y étaient piégés (FuturaSciences 2018). Ces derniers alimentent davantage le cercle vicieux du climat, encore lui…

 

La déforestation

Quelle qu’en soit la raison, la déforestation est responsable de nombreux problèmes liés :

– au réchauffement climatique à travers une diminution des puits de carbone : moins de végétaux, moins d’absorption de CO2, plus de GES dans l’atmosphère et ainsi de suite. Le cercle vicieux, toujours lui.

– aux écosystèmes par destruction des habitats. Pour exemple, la surface de la forêt primaire de Bornéo a drastiquement diminué au profit des plantations de palmiers (Fig 10.). De nombreuses espèces, comme les rhinocéros, les tigres, les éléphants ou encore les emblématiques orangs-outans de l’île, se retrouvent alors vulnérables. Ainsi, près de 90 % de la biodiversité locale a actuellement disparu (Magnard 2016),

– aux populations endémiques par destruction des habitats et diminution de leurs ressources vitales.

Fig 10. Evolution de la surface de la forêt primaire de Bornéo (source : Arte).

Les pratiques intensives ou de masse

En ne citant qu’elles, les principales techniques actuelles utilisées pour nourrir l’humanité sont responsables :

– de l’augmentation de la déforestation. Pour libérer de la surface agricole, de nombreuses forêts primaires sont sacrifiées,

– de la diminution massive du nombre d’individus de plusieurs espèces à travers les pratiques de pêches intensives par exemple,

– de la perte de la biodiversité via notamment les systèmes de monoculture.

 

Les pollutions

Les activités humaines irraisonnées sont sources de pollutions qui présentent des conséquences de tous types.

Les pollutions liées aux engrais (tels que les nitrates et les phosphates) et autres produits industriels chimiques. En trop grande quantité, une partie peut s’infiltrer dans les sols jusqu’aux nappes phréatiques ou atteindre les cours d’eau par ruissellement. Les nappes et les cours d’eau sont les principaux « fournisseurs » d’eau destinée à la consommation. Pour exemple, une concentration excessive de nitrate est un danger pour la santé de l’Homme (perturbation du transport d’O2 dans le sang, cancers, etc.) (Institut de l’Environnement et de la Santé).

En outre, la présence d’une quantité excessive de nitrate dans un environnement aquatique entraîne un phénomène d’eutrophisation : prolifération d’algues opportunistes, appauvrissement en oxygène et déséquilibre de l’écosystème dans son ensemble.

Les énergies fossiles : La combustion des hydrocarbures conduit à la libération de polluants dans l’atmosphère et consécutivement à l’augmentation des maladies respiratoires, cardio-vasculaires, des cancers du poumon, etc… En 2015, cette pollution a été responsable de la mort de 8,8 millions de personnes (FuturaSciences 2019). 

Le principal mode de vie actuel : Basé sur la dépendance et la surconsommation, il entraîne logiquement une forte production de déchets (Fig 11.). Ces derniers sont sources de pollutions graves ayant des effets néfastes sur l’environnement, la santé de l’Homme ou encore la biodiversité.

Fig 11. Volume de déchets par région : données passées et estimations (source : Futura sciences).

Cette manière de vivre, dans son ensemble, conduirait à la disparition supplémentaire de 38 % à 46 % des espèces animales et végétales d’ici 2050 (CNRS le journal 2018) : la fameuse 6ème crise biologique…

 

Face à toutes ces conséquences, associées aux activités anthropiques, il est urgent d’agir.

C’est pour tout cela que nous nous engageons : pour infléchir la trajectoire, préparer la suite, susciter les initiatives et marquer les consciences.

Mettre en lumière un avenir durable en accord avec la Nature.

Cycling for Earth, mouvement pour la planète